Le poivre pour remplacer les sulfites dans le vin bio ?
Lorsque les vignerons produisent du vin, ils utilisent pour la plupart des sulfites. Ils sont diffusés sur les feuilles de vigne pour prévenir des maladies ; dans la barrique, la cuve ou le foudre pour désinfecter avant d’élever les nouvelles cuvées ; et pour conserver le vin une fois embouteillé. Le soufre ou les sulfites ne sont pas mauvais pour la santé tant qu’ils sont utilisés avec parcimonie. En agriculture biologique, ils sont réglementés par un cahier des charges strict et donc utilisés en petite quantité. Cependant, certains viticulteurs ont trouvé une nouvelle alternative non nocive pour leurs vins sans sulfites : le poivre.
Qu’est-ce que le soufre, les sulfites ?
Le rôle des sulfites dans le vin
On trouve des sulfites dans les vins depuis plus de 50 ans. Ils permettent de stabiliser le vin et de prévenir des maladies. Depuis quelques années, de plus en plus de vignerons se lancent dans une conversion en agriculture biologique. Leur but ? Protéger leur santé, celle des consommateurs et la planète. Ils font donc d’autant plus attention à leur utilisation de soufre qu’ils réduisent au maximum autorisé selon le cahier des charges de l’agriculture biologique, voire même pour certains, produisent des vins sans soufre.
Soufre, S02, sulfites : quelle différence ?
Les sulfites, le SO2 et le soufre sont les noms utilisés pour parler de la matière que l’on ajoute sur les vignes, dans les cuves et en bouteille. Le soufre est la matière brute, le S02 est son nom chimique, et les sulfites sont un mélange de soufre et d’oxygène que l’on retrouve dans le vin.
Les sulfites, présents naturellement sur les raisins
À l’état naturel, une petite quantité de soufre est présente sur la peau du raisin. Il permet de se protéger des attaques de maladies extérieures.
En agriculture biologique, les doses de soufre autorisées sont de 100mg/l pour les vins rouges, 150mg/l pour les vins blancs et les rosés, 205mg/l pour les mousseux et les vins effervescents, 170mg/l pour les vins de liqueur et 270mg/l pour les vins moelleux et 370mg/l pour les liquoreux.
En biodynamie, les doses sont de 70mg/l pour les vins rouges, 90mg/l pour les vins blancs et les vins rosés, 60mg/l pour les mousseux et effervescents, 80mg/l pour les vins de liqueur et 200 mg/l pour les vins liquoreux.
Pour les vins nature, les doses de soufre sont de 30mg/l pour les vins rouges, 40mg/l pour les vins blancs et les rosés, 40mg/l pour les mousseux et les vins effervescents, 40mg/l pour les vins de liqueur et 40mg/l pour les vins moelleux et 40mg/l pour les liquoreux.
Les vins conventionnels ont autour de 150mg/l pour les rouges (soit plus de 4 fois la dose utilisée pour les vins nature), 200mg/l pour les blancs et rosés, 235mg/l pour les mousseux et les vins effervescents, 200mg/l pour les liqueurs, 300mg/l pour les moelleux et 400mg/l pour les liquoreux.
Cela signifie qu’en agriculture biologique, sur un hectolitre de vin rouge (100 litres), le vigneron met 10 grammes de soufre pour protéger son vin rouge des agressions extérieures ; pour les vins nature, 3 grammes ; et pour les vins conventionnels, 15 grammes.
Dans certaines exploitations viticoles en culture conventionnelle, les viticulteurs n’ont pas de limite d’utilisation du soufre et en utilisent en grande quantité à chaque épandage.
En fonction de la couleur du vin, la dose ne sera pas la même. En effet, les tannins des vins rouges permettent de naturellement mieux conserver le vin. Le Cabernet Sauvignon qui est un cépage de raisin rouge beaucoup utilisé dans les vignobles de Bordeaux produit des vins très tanniques. Si nous prenons l’exemple de ce cépage bordelais, ne pas ajouter de soufre permet de produire un vin de meilleure qualité. En diminuant ou en supprimant la quantité de soufre, on produit des vins encore meilleurs pour la santé, qui ne seront pas altérés par le goût du SO2. En prenant soin des raisins et du chai, le jus est sain et n’a pas besoin de subir un surdosage de soufre.
Du poivre à la place des sulfites dans le vin
Les propriétés du poivre
Le poivre aurait la même action sur la conservation des vins biologiques que le soufre. Cette méthode nous vient tout droit du Moyen-Âge et a été remise au goût du jour par quelques vignerons français. Le vin est donc sans soufre ajouté et contient environ 0,002% de poivre biologique. En effet, les graines de poivre sont des alcaloïdes qui ont des effets antimicrobiens et qui jouent le rôle d’antioxydants sur le vin. À l’entonnage (la mise du vin dans un tonneau), le vigneron remplace la dose de sulfites par du poivre sans perturber l’équilibre du vin. La quantité de poivre est limitée pour ne pas se sentir à la dégustation, une cuillère, soit l’équivalent de 2 grammes pour 1 hectolitre de vin. Le vin est ensuite élevé en barriques pendant un an. Cette méthode s’inspire de la salaison qui permet de conserver pendant des mois la viande avec du sel et du poivre.
Une alternative aux sulfites : le poivre
Ajouter du poivre dans le vin bio est une alternative à l'utilisation du soufre car il permet de protéger les vins. Cette innovation pourrait changer la donne et notamment pour les domaines viticoles conventionnels qui utilisent engrais et pesticides chimiques. Entre les différentes méthodes de production des vins : vins biologiques, vins biodynamiques, vins nature ou vins sains, les vignerons ont dû faire preuve d’inventivité pour conserver le vin. Une vigne en bonne santé et choyée par les viticulteurs qui s’en occupent sait rendre la pareille en produisant du bon raisin.